Je m'autoriserai quelques réflexions générales sur notre système pénal, l'”éco-système” français pour employer un terme à la mode ainsi que sur la justice restaurative telle que je la perçois.
J'évoquerai également quelques observations sur le rôle du procureur qui est l'un des acteurs du champ pénal dans sa dimension institutionnelle.
Les données
Le processus pénal doit intégrer des données cumulatives et répondre à plusieurs interrogations :
Les fonctions de la peine
Robert Cario, le père de la justice restaurative française, voit trois fonctions traditionnelles à la peine :
Il s'agit là de la fonction morale de la peine. La rétribution pénale est entendue comme une vengeance sociale.
C'est la fonction utilitaire de la peine. Elle cherche à prévenir le crime, à l'empêcher.
C'est la fonction réhabilitative qui vise à la réinsertion de l'auteur. C'est dans ce modèle que s'inscrit la justice restaurative.
[…]
Le modèle de la justice restaurative
La justice restaurative cherche à réaliser la triple ambition du système pénal. Elle vise à réparer tous les préjudices causés par le crime :
Elle tend à la responsabilisation et à l'apaisement.
À la justice traditionnelle, verticale, s'ajoute une justice nouvelle, collaborative, circulaire.
À la justice imposée, infligée s'ajoute une justice consentie, acceptée.
La justice restaurative doit agir pour que la victime assume son traumatisme et que l'auteur assume sa condamnation.
Elle œuvre pour la résilience de la victime qui doit se reconstruire. Elle oeuvre pour la désistance de l'auteur qui doit sortir de la délinquance.
Le procureur
Le rôle du procureur est triple :
Pour ce faire, il est en rapport constant avec les enquêteurs mais aussi avec les citoyens victimes d'infraction et toute personne qui porte à sa connaissance une illégalité pénalement sanctionnée.
Il est au contact immédiat de la mort et de la souffrance. Il se transporte sur les lieux d'un meurtre, et rencontre ceux que le malheur touche brutalement. Il lui est rendu compte des viols, des violences, des vols, des agressions diverses, des accidents graves et de tout fait de nature à susciter une forte émotion dans le public.
Il est en rapport avec les juges et les avocats mais aussi les services d'enquête, les experts, les associations, les administrations et les élus locaux. Il suit les dossiers d'instruction, défère en justice, accuse à l'audience. Le mensonge, la haine et la souffrance des victimes sont son quotidien.
Là encore, deux figures de procureur se combinent:
« Le procureur est le confesseur des citoyens égarés sur le chemin de la délinquance » disait non sans pertinence un magistrat du parquet.
Comment le procureur use t-il de la justice restaurative, cette justice parallèle qu'il ne peut ignorer ?
L'article préliminaire du code de procédure pénale fonde sa démarche.
« La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties. L'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale. »
Au début de l'enquête : l'article 41 du même code lui donne un cadre d'action préalable :
« Le procureur de la République peut faire vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne faisant l'objet d'une enquête et être informé sur les mesures propres à favoriser l'insertion sociale de l'intéressé.
Le procureur de la République peut également recourir à une association d'aide aux victimes de porter aide à la victime de l'infraction. »
Il a le choix de la réponse pénale, conçue comme une alternative aux poursuites pénales traditionnelles. L'article 41-1 du code de procédure pénale lui offre une palette de mesures possibles :
« S'il lui apparaît qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits, le procureur de la République peut imposer à l'auteur un stage :
Le procureur fait de la justice restaurative sans le savoir !
[…]
Pour mettre en œuvre la justice restaurative, le procureur peut s'appuyer sur la loi du 15 août 2014 qui introduit celle-ci dans le code de procédure pénale. Un texte ardemment attendu et qui sécurise, s'il en était besoin, la démarche restaurative.
L'article 10-1 du code de procédure fixe le dispositif :
« À l'occasion de toute procédure pénale et à tous les stades de la procédure, y compris lors de l'exécution de la peine, la victime et l'auteur d'une infraction, sous réserve que les faits aient été reconnus, peuvent se voir proposer une mesure de justice restaurative.
Constitue une mesure de justice restaurative toute mesure permettant à une victime ainsi qu'à l'auteur d'une infraction de participer activement à la résolution des difficultés résultant de l'infraction, et notamment à la réparation des préjudices de toute nature résultant de sa commission.
Cette mesure ne peut intervenir qu'après que la victime et l'auteur de l'infraction ont reçu une information complète à son sujet et ont consenti expressément à y participer.
Elle est mise en œuvre par un tiers indépendant formé à cet effet. Elle est confidentielle. »
Il a fallu attendre une circulaire du 15 mars 2017 pour que la Chancellerie rappelle aux parquets l'existence de ce modèle de justice parallèle, constructif et socialement bénéfique.
La circulaire donne des exemples de justice restaurative dont on doit s'inspirer :
Pour Antoine Garapon, « une peine juste est une peine qui régénère les liens blessés par le crime ».
Je dirai quant à moi qu'une bonne justice est une justice humaine, équitable et réparatrice.
Jacques Dallest, Procureur général près la Cour d'appel de Grenoble
* Extraits d'une contribution qui sera publiée intégralement dans les Actes de la Journée d'études à paraître prochainement aux éditions Médias & Médiations.
Cette présentation a été faite le 22 mai 2019
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